Au début du mois de mars, nous nous sommes rendus dans la ville de Muang Xay, préfecture de la province d'Oudomxay. Ici, nous continuons notre mission auprès des équipes provinciales du CCL. Le travail que nous faisons, permet de soutenir le CCL dans son projet de développement rural à Oudomxay.
Le CCL oeuvre dans cette province (en particulier dans les districts de La et Namor) pour tenter de contribuer au développement rural et à l'amélioration des conditions d'existences des villageois.
Afin de mettre à bien ce projet, trois objectifs principaux ont été déterminés :
Améliorer la santé et la situation nutritionnelle des communautés
Contribuer au développement et à la diversification des productions agricoles
Contribuer à la gestion durable des ressources naturelles et à la défense des droits des communautés.
Le projet du développement de la filière du thé des forêts entre dans le troisième de ces objectifs. Il s'agit en effet de protéger cette ressource fragile et convoitée.
Oudomxay, une région rurale et montagneuse
Oudomxay est une province montagneuse du nord du Laos où l'agriculture est la principale activité économique. Elle implique 80% de la population et représente environ 56% des richesses produites.
On y produit beaucoup de riz (sur système d'abattis-brûlis dans les montagnes, ou dans des rizières en casier irrigué en fond de vallée), mais aussi des plantes potagères (comme des citrouilles, des piments etc).
Certains animaux sont aussi élevés pour leur force de traction ou pour être mangés (buffles d'eau, vaches, cochons, poulets...). Enfin, les ressources forestières jouent un rôle très important dans ces systèmes agraires traditionnels. Elles offrent à beaucoup de paysans une source de revenus supplémentaires ou une source d'alimentation complémentaire.
L'alimentation de certaines minorités ethniques se base d'ailleurs essentiellement sur la consommation de ces ressources forestières.
Malgré tout, la province d'Oudomxay reste plutôt pauvre. Ainsi dans les disctricts de La et Namor, 25% de la population est touchée par la pauvreté, ce chiffre atteint 39% pour la population rurale.
Ces derniers temps, sous l'impulsion de certains investisseurs étrangers, de nouvelles cultures de rente viennent s'inscrire dans le paysage agricole. On cultive par exemple du tabac en saison sèche, de la canne à sucre sur certaines pentes ou encore du maïs (en saison sèche ou humide). Des forêts naturelles sont parfois remplacées par des plantations d'hévéas ou de tecks. Ces nouvelles productions offrent de nouveaux revenus aux paysans des montagnes, mais les exposent aussi à des risques économiques en raison de l'ouverture au marché international (et donc à ses fluctuations) et à des risques sanitaires et environnementaux liés à l'intensification des pratiques agricoles (hausse de l'utilisation de produits phytosanitaires, diminution des cycles de rotation, utilisation de semences moins adaptées aux conditions locales etc...)
Oudomxay est située sur un carrefour commercial entre la Chine, la Birmanie, le Vietnam et la Thaïlande. De nombreux camions transportant des denrées agricoles et des produits industriels transitent par les routes sinueuses de cette région montagneuse. La capitale Muang Xay, est d'ailleurs particulièrement marquée par son grand nombre d'enseignes ou de commerces tenus par des chinois.
L'ouverture de la nouvelle ligne de chemin de fer qui reliera la Chine à la Thaïlande en passant par le Laos d'ici quelques années, renforcera Oudomxay dans cette position d'interface commerciale.
Renforcer et protéger les zones rurales - les plus fragiles - à la pression foncière grandissante permettrait de préserver les ressources et les forêts existantes dans cette région.
Pourquoi le thé des forêts ?
Certains villages de la province d'Oudomxay, disposent de thé des forêts. Des graines auraient été amenées par d'anciennes caravanes chinoises qui ont transité dans cette région pendant plusieurs siècles. D'autres variétés de thé, sont aussi endémiques du Laos. Deux nouvelles espèces de thé auraient d'ailleurs été récemment répertoriées au Laos. Les arbres peuvent pousser naturellement dans la forêt, ou être cultivés dans des petits jardins (comme on a pu le voir dans le village de Pakham, situé dans la province de Namor).
Ces arbres représentent une vraie richesse pour les paysans des montagnes. En effet, le thé des forêts dispose d'une haute qualité organoleptique et il est de ce fait très convoité par les consommateurs chinois.
Nous espérons donc que le développement de la filière du thé des forêts, permettrait de lancer une dynamique économique nouvelle, et inciterait les villageois et les autorités locales de la région à protéger les forêts, et faire face à la pression foncière grandissante.