Le Laos, pays en pleine mutation alimentaire
- T(h)erroirs
- 22 avr. 2020
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 23 avr. 2020
Le Laos, connaît depuis une quinzaine d'année, une incroyable croissance économique. Ceci est particulièrement visible lorsque l'on s'attarde sur certains indicateurs économiques (PIB, IDE...), qui n'ont de cesse d'augmenter.
Ce boom économique n'est pas sans effet sur la société laotienne. En effet, celle-ci est directement impactée, sur des aspects qui peuvent être d'ordre humain - on voit par exemple une nette augmentation de l'alphabétisation et de l'espérance de vie -, ou encore d'ordre culturel.
Cependant, ce nouvel essor, ne touche pas égalitairement tout le Laos. En effet, les grandes villes en sont les principales bénéficiaires. La campagne du Nord du Laos - que nous avons pu observer -, plus enclavée dans les montagnes est encore loin de pouvoir aspirer à de tels élans de modernité.
Mais comment la transition sociétale au Laos se traduit-elle ?
Ce que nous avons pu observer lors de notre séjour, et ce qui est assez frappant, est que la société laotienne est fortement liée à l'agriculture. C'est par exemple le cas dans la région d'Oudomxay, ou 80% des actifs travaillent dans le domaine agricole.
Ceci est évident lorsqu'on se déplace dans les villages où tout le monde travaille dans les champs. Mais même dans la ville d'Oudomxay, les habitants restent plutôt proches du domaine agricole, la plupart des familles possède par exemple des poules et un petit potager lorsqu'ils ont un jardin.
Aussi, cela peut se voir à travers certaines habitudes alimentaires qui persistent dans cette ville provinciale. On voit par exemple qu'il y a encore de nombreux marchés. On y vend surtout des produits bruts (peu ou pas transformés). On peut même y trouver des animaux pas même dépouillés (on est loin du surimi ou des steaks hachés) !
Ces habitudes alimentaires peuvent aussi se voir dans beaucoup de petits restaurants qui proposent de la cuisine laotienne. Les cuisines sont directement dans la salle, et parfois même dans la rue. On y fait bouillir à feu de bois dans de grandes casseroles des bouillons de viandes pour préparer le feû traditionnel. Ces cuisines gardent une certaine ressemblance avec celles que l'on peut rencontrer dans les villages.
Mais face à ce mode de vie traditionnel, de nouvelles habitudes plus modernes viennent peu à peu s'immiscer dans le pays. Ceci est frappant dans les villes et tout particulièrement à Vientiane. Cette aspiration croissante envers une société moderne, à l'image des sociétés thaïlandaise et coréenne (qui font office d'idéal pour beaucoup de jeune laotien), entraîne un fort contraste avec le Laos traditionnel.
De plus en plus de petits supermarchés viennent s'installer dans le paysage urbain. Mais dans ces supermarchés, pas question de vendre des produits bruts. Ici, on ne vend que des produits ultratransfomés (qui n'ont plus rien à voir avec ce qu'on trouve dans les marchés traditionnels). On trouve beaucoup de gâteaux, de pâtes instantanées, un grand nombre de boissons lactées ou de sodas très sucrés. C'est ainsi, que pour les nouvelles classes moyennes et aisées des villes, les plats préparés ou achetés chez le traiteur viennent alléger les heures passées au fourneau.
A la sortie des écoles, il n'est pas non plus rare de voir des jeunes laotiens consommer des produits très riches (glace, soda, bubble tea...).
Ces nouvelles habitudes alimentaires, qui font appel à des produits agricoles transformés souvent étrangers - provenant de Thaïlande, de Chine ou du Vietnam dans la plupart des cas -, sont aussi associés à une utilisation exagérée et désuète de plastique. En effet, ici, le plastique fait figure de modernité. Il n'est par exemple pas rare de voir des gens se promener avec une bouteille d'eau dans un sac voire deux sacs plastiques. Il est d'ailleurs parfois assez compliqué de refuser les sacs plastiques proposés par les commerçants.
Dans cette société ou la faim reste une problématique d'actualité notamment dans les campagnes, les nouvelles habitudes alimentaires conduisent à l'apparition du phénomène de surnutrition. Dans les villes, de plus en plus de personnes sont en condition de surpoids. Si la tendance ne change pas, il y a fort à penser, que l'obésité devienne un enjeu national dans les années à venir.
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